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LES MILLE ET UN JOURS

viens loger avec moi. » En disant cela, je le conduisis à ma maison ; je lui en montrai tous les appartements. Il les trouva beaux et bien meublés. À chaque moment il s’écriait : « Ô ciel ! qu’a donc fait Hassan plus que les autres, pour mériter que vous répandiez sur lui tant de bien ? — Comment donc, faquir, lui dis-je, est-ce que tu verrais avec chagrin l’état où je suis ? il semble que ma prospérité t’afflige. — Non, me répondit-il, au contraire, j’en ai beaucoup de joie. Bien loin de porter envie à la félicité de mes amis, je suis charmé de les voir dans une situation florissante. » En achevant ces mots, il me serra étroitement entre ses bras, pour mieux me persuader qu’il parlait à cœur ouvert. Je le crus sincère, et, agissant de bonne foi avec lui, je me livrai sans défiance au plus lâche, au plus envieux, au plus perfide de tous les hommes. « Il faut, lui dis-je, que nous fassions aujourd’hui la débauche ensemble. » En même temps, je le pris par la main et le menai dans une salle où mes esclaves avaient dressé une petite table à deux couverts.

LXVI

« Nous nous assîmes tous deux. On nous apporta plusieurs plats de riz de différentes couleurs[1], avec des dattes conservées dans du sirop. Nous mangeâmes encore d’autres mets ; après quoi j’envoyai un de mes esclaves acheter du vin dans un endroit

  1. Les Persans donnent au riz toutes sortes de couleurs.