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LES MILLE ET UN JOURS

Ce mystère, qu’on me faisait, me donna beaucoup à penser ; mais j’eus beau fatiguer mon esprit pour tâcher d’être au fait, je fis des efforts superflus. Schapour me laissa dans l’eau fort longtemps, et je commençais à perdre patience, lorsqu’il revint suivi de quatre esclaves, dont deux étaient chargés de linges et d’habits, et les autres de toutes sortes de provisions. « Je vous demande pardon, seigneur, me dit-il, je suis fâché de vous avoir tant fait attendre. » Aussitôt les esclaves mirent leurs paquets sur des sofas, et s’empressèrent à me servir. Ils me frottèrent avec des linges fins et neufs ; ensuite ils me firent prendre une riche veste, avec une robe magnifique et un turban. « Où tout ceci doit-il aboutir ? disais-je en moi-même ; par l’ordre de qui cet eunuque me traite-t-il de cette manière ? » J’avais une impatience d’en être éclairci que je ne pouvais modérer.

LXIII

« Schapour s’en aperçut bien. « C’est à regret, me dit-il, que je vous vois en proie à votre inquiétude, mais je ne puis vous soulager. Quand il ne m’aurait pas été expressément défendu de parler, quand, trahissant mon devoir, je vous instruirais de tout ce que je vous cèle, je ne vous rendrais pas plus tranquille. D’autres désirs plus violents succéderaient à ceux qui vous pressent. Vous ne saurez que cette nuit ceux que vous souhaitez d’apprendre. »

Quoique je n’eusse qu’un bon augure à tirer des discours de l’eunuque, je ne laissai pas d’être pendant tout le reste de la journée dans une cruelle