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LES MILLE ET UN JOURS

Schah-Tahmaspe, tenaient chacun le bout d’un cordon de soie attaché au cercueil. Toutes les femmes du palais venaient ensuite en faisant d’affreux hurlements ; et quand le corps fut arrivé au lieu de la sépulture, tout le monde se mit à crier : Laylah illallah[1].

Je ne vis point le reste de la cérémonie, parce que l’excès de ma douleur et le sang que j’avais perdu me causèrent un long évanouissement. Un de nos officiers me fit promptement porter dans notre chambre, où l’on eut grand soin de moi : on me frotta le corps d’un excellent baume, si bien qu’au bout de deux jours je sentis mes forces rétablies ; mais peu s’en fallut que le souvenir de la princesse ne me rendit insensé. « Ah ! Zélica, disais-je en moi-même à tous moments, est-ce ainsi que vous dégagez la promesse que vous me fites en vous quittant ? Est-ce là cette marque de tendresse que vous vouliez me donner ? » Je ne pouvais me consoler, et le séjour de Chiras me devenant insupportable, je sortis secrètemennt de la cour de Perse trois jours après les obsèques de la princesse Zélica.

LXI

« Possédé de mon affliction, je marchai toute la nuit sans savoir où j’allais, ni où je devais aller. Le lendemain matin, m’étant arrêté pour me reposer, il passa près de moi un jeune homme qui avait un habillement

  1. Cri qu’on jette en Perse lorsqu’on enterre les morts, et qui signifie : Il n’y a point d’autre Dieu que Dieu.