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CONTES ORIENTAUX

Quelle funeste assurance vous me donnez de votre fidélité ; vous oubliez que je suis esclave de la princesse de Perse. Si vous payez ses bontés d’ingratitude, vous attirerez sur nous sa colère, et nous périrons tous les deux : il vaut mieux que je vous cède à une rivale si puissante, c’est le seul moyen de nous conserver.

— Non, non, répliquai-je brusquement, il en est un autre que mon désespoir choisira plutôt ; c’est de me bannir de la cour ; ma retraite vous mettra d’abord à couvert de la vengeance de Zélica, vous rendra votre tranquillité : et, tandis que peu à peu vous oublierez l’infortuné Hassan, il ira dans les déserts chercher la fin de ses malheurs. » J’étais si pénétré de ce que je disais, que la dame se rendit à ma douleur, et me dit : « Cessez, Hassan, de vous abandonner à une affliction superflue ; vous êtes dans l’erreur, et vous paraissez mériter qu’on vous détrompe. Je ne suis point une esclave de la princesse Zélica ; je suis Zélica même ; la nuit que vous êtes venu passer dans mon appartement, j’ai passé pour Calé-Cairi, et vous avez pris Calé-Cairi pour moi. » À ces mots, elle appela une de ses femmes, qui, sortant d’entre quelques cyprès où elle se tenait cachée, accourut vite à sa voix, et je reconnus, en effet, cette esclave que j’avais prise pour la princesse de Perse.

LX

« Vous voyez, Hassan, me dit Zélica, vous voyez la véritable Calé-Cairi ; je lui rends son nom et je