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LES MILLE ET UN JOURS

LIX

« Voilà de quelle manière je sortis de l’appartement de la princesse Zélica-Béghume et du nouveau péril où je m’étais imprudemment jeté moi-même. Je rejoignis mes camarades quelques heures après. L’oda bachi[1] me demanda pourquoi j’avais couché hors du palais. Je lui répondis qu’un de mes amis, marchand de Chiras, qui venait de partir pour Basra avec toute sa famille, m’avait retenu chez lui, et que nous avions passé la nuit à boire. Il me crut, et j’en fus quitte pour quelques réprimandes. J’étais trop charmé de mon aventure pour l’oublier ; j’en rappelais à tous moments jusqu’aux moindres circonstances, particulièrement celles qui flattaient le plus ma vanité, c’est-à-dire qui me faisaient croire que je m’étais attiré l’attention de l’esclave favorite de la princesse. Huit jours après, un eunuque vint à la porte de la chambre du roi, et dit qu’il voulait me parler. Je l’allai trouver pour lui demander de quoi il s’agissait. « Ne vous appelez-vous pas Hassan ? » me dit-il. Je lui répondis qu’oui. En même temps il me mit entre les mains un billet, et disparut aussitôt. On me mandait que si j’étais d’humeur à me trouver encore la nuit prochaine dans les jardins du sérail, après l’heure de la retraite, au même endroit où l’on m’avait rencontré, j’y verrais une personne qui était très sensible à la préférence que je lui avais donnée sur toutes les autres femmes de la princesse.

  1. L’oda bachi, maître des pages, est celui qui a le pouvoir de les châtier lorsqu’ils ont commis quelque faute.