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LES MILLE ET UN JOURS

choisiriez pour maîtresse, s’il vous était permis de faire un choix. »

Quoique les esclaves de Zélica fussent parfaitement belles, et que cette princesse même eût de quoi se flatter de la préférence, mon cœur se rendit sans balancer aux charmes de Calé-Cairi ; mais, cachant des sentiments qui me semblaient faire injure à Zélica, je dis à cette princesse qu’elle ne devait point se mettre sur les rangs, ni disputer un cœur avec ses esclaves, puisque telle était sa beauté que partout où elle paraîtrait on ne pourrait avoir des yeux que pour elle. En disant ces paroles, je ne pus m’empêcher de regarder Calé-Cairi d’une manière qui lui fit assez juger que la flatterie seule me les avait dictées. Zélica s’en aperçut aussi : « Hassan, me dit-elle, vous êtes trop flatteur ; je veux plus de sincérité, je suis persuadée que vous ne dites pas ce que vous pensez ; donnez-moi la satisfaction que je vous demande ; découvrez-nous le fond de votre âme, toutes mes femmes vous en prient ; vous ne pouvez nous faire un plus grand plaisir. » Effectivement, toutes les esclaves m’en pressèrent ; Calé-Cairi surtout se montrait la plus ardente à me faire parler, comme si elle eût deviné qu’elle y était la plus intéressée.

Je me rendis enfin à leurs instances ; je bannis ma timidité, et m’adressant à Zélica : « Ma princesse, lui dis-je, je vais donc vous satisfaire. Il serait difficile de décider qui est la plus belle dame, mais l’aimable Calé-Cairi est celle pour qui je me sens le plus d’inclination. »

Je n’eus pas achevé ces mots, que les esclaves commencèrent à faire de grands éclats de rire sans qu’il parût sur leurs visages la moindre marque