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LES MILLE ET UN JOURS

bougies parfumées, qui se faisaient agréablement sentir. Il me parut aussi riche que celui du roi : l’or et l’argent y brillaient de toutes parts.

En entrant dans la chambre de Zélica-Béghume, c’est ainsi que se nommait la princesse de Perse, je remarquai qu’il y avait au milieu, sur le tapis de pied, quinze ou vingt grands carreaux de brocart disposés en rond : toutes les dames s’allèrent jeter dessus, et l’on m’obligea de m’y asseoir aussi ; ensuite Zélica demanda des rafraîchissements. Six vieilles esclaves, moins richement vêtues que celles qui étaient assises, parurent à l’instant ; elles nous distribuèrent des mahramas[1], et servirent, peu de temps après, dans un grand bassin de martabani[2], une salade composée de lait caillé, de jus de citron et de tranches de concombres. On apporta une cuiller de cocnos[3] à la princesse, qui prit d’abord une cuillerée de salade, la mangea, et donna aussitôt sa cuiller à la première esclave qui était assise auprès d’elle à sa droite ; cette esclave fit la même chose que sa maîtresse, si bien que toute la compagnie se servit de la même cuiller à la ronde, jusqu’à ce qu’il n’y eût plus rien dans le bassin. Alors les six vieilles esclaves dont j’ai parlé nous présentèrent de fort belle eau dans des coupes de cristal.

Après ce repas, l’entretien devint aussi vif que si nous eussions bu du vin ou de l’eau-de-vie de dattes. Calé-Cairi, qui par hasard ou autrement s’était placée vis-à-vis de moi, me regardait quelquefois en souriant, et semblait me vouloir faire comprendre

  1. Petits carrés d’étoffe qu’on se met sur les genoux pour s’essuyer les doigts.
  2. Porcelaine verte.
  3. Cuillers faites de becs d’oiseaux nommés cocnos.