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CONTES ORIENTAUX

tremblante de la frayeur que je lui avais causée. « Calé-Cairi, lui dit une d’entre elles, avez-vous encore envie de prendre de pareils passe-temps ? — Oh ! pour cela non, répondit Calé-Cairi ; cela ne m’arrivera plus ; je suis bien payée de ma curiosité. »

Les esclaves commencèrent ensuite à m’environner et à plaisanter. « Ce page, disait l’une, est un peu vif ; il est né pour les belles aventures. — Si jamais, disait une autre, je me promène toute seule la nuit, je souhaite de n’en pas rencontrer un plus sot. » Quoique page, j’étais fort déconcerté de toutes leurs plaisanteries, qu’elles accompagnaient de grands éclats de rire. Quand elles m’auraient raillé pour avoir été trop timide, je n’aurais pas été plus honteux.

Il leur échappa aussi des railleries sur l’heure de la retraite que j’avais laissé passer ; elles dirent que c’était dommage que je périsse, et que je méritais bien qu’on me sauvât la vie, puisque j’étais si dévoué au service des dames. Alors celle que j’avais entendu nommer Calé-Cairi, s’adressant à une autre, lui dit : « C’est à vous, ma princesse, d’ordonner de son sort ; voulez-vous qu’on l’abandonne, ou qu’on lui prête du secours ? — Il faut le délivrer du danger où il est, répondit la princesse ; qu’il vive, j’y consens ; il faut même, afin qu’il se souvienne plus longtemps de cette aventure, la rendre encore plus agréable pour lui. Faisons-le entrer dans mon appartement, qu’aucun homme jusqu’ici ne peut se vanter d’avoir vu. » Aussitôt deux esclaves allèrent chercher une robe de femme et me l’apportèrent, je m’en revêtis, et me mêlant parmi les personnes de la suite de la princesse, je l’accompagnai jusque dans son appartement, qu’éclairaient une infinité de