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CONTES ORIENTAUX

réponde à la question que tu luis as proposé. Pourquoi t’es-tu mis en danger de perdre l’objet de ton amour ? — Seigneur, répondit Calaf, que votre majesté n’appréhende rien ; il est impossible que la princesse me dise comment s’appelle le prince dont je lui ai demandé le nom, puisque je suis ce prince et que personne ne me connaît dans votre cour.

— Ce discours me rassure, s’écria le roi avec transport ; j’étais alarmé, je te l’avoue : Tourandocte est fort pénétrante ; la subtibilité de son esprit me faisait trembler pour toi ; mais, grâce au ciel, tu me rends tranquille : quelque facilité qu’elle ait à percer le sens des énigmes, elle ne peut, en effet, deviner ton nom ; je ne t’accuse plus d’être un téméraire, et je m’aperçois que ce qui m’a paru un défaut de prudence est un tour ingénieux dont tu t’es servi pour ôter tout prétexte à ma fille de se refuser à tes vœux. »

Altoun-Kan, après avoir ri avec Calaf de la question faite à la princesse, se disposa à prendre le divertissement de la chasse. Il se revêtit d’un cafetan étroit et léger, et fit enfermer sa barbe dans un sac de satin noir. Il ordonna aux mandarins de se tenir prêts à l’accompagner, et fit donner des habits de chasse au prince des Nogaïs ; ils mangèrent quelques morceaux à la hâte ; ensuite ils sortirent du palais. Les mandarins, dans des chaises d’ivoire, enrichies d’or et découvertes, étaient à la tête ; chacun avait six hommes qui le portaient, deux qui marchaient devant lui avec des fouets de corde, et deux autres qui le suivaient avec des tables d’argent, sur lesquelles étaient écrites en gros caractères toutes ses qualités.

Le roi et Calaf, dans une litière de bois de sandal