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CONTES ORIENTAUX

et la honte ajoutaient de nouveaux charmes. Sa tête était parée de fleurs naturelles placées avec un art infini, et ses yeux paraissaient plus brillants que les étoiles. Elle était aussi belle que le soleil quand il se montre dans tout son éclat à l’ouverture d’un nuage épais. L’amoureux fils de Timurtasch, à la vue de cette incomparable princesse, au lieu de répondre à la question proposée, demeura muet et immobile ; aussitôt tout le divan qui s’intéressait pour lui, fut saisi d’une frayeur mortelle ; le roi même en pâlit, et crut que c’était fait de ce jeune prince.

Mais Calaf, revenu de la surprise que lui avait causée tout à coup la beauté de Tourandocte, rassura bientôt l’assemblée en reprenant ainsi la parole :

« Charmante princesse, je vous prie de me pardonner si je suis demeuré quelques moments interdit ; j’ai cru voir un de ces objets célestes qui font le plus bel ornement du séjour qui est promis aux fidèles après leur mort ; je n’ai pu voir tant d’attraits sans être troublé : ayez la bonté de répéter la question que vous m’avez faite, car je ne m’en souviens plus : vous m’avez fait tout oublier. — Je vous ai demandé, dit Tourandocte, quel est l’arbre dont toutes les feuilles sont blanches d’un côté et noires de l’autre ? — Cet arbre, répondit Calaf, représente l’année, qui est composée de jours et de nuits. »

Cette réponse fut encore applaudie dans le divan ; les mandarins et les docteurs dirent qu’elle était juste, et donnèrent mille louanges au jeune prince. Alors Altoun-Kan dit à Tourandocte : « Allons, ma fille, confesse-toi vaincue, et consens d’épouser ton vainqueur : les autres n’ont pu seulement répondre à une de tes questions, et celui-ci, comme tu vois, les explique toutes. — Il n’a pas encore remporté la