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LES MILLE ET UN JOURS

XL

Le fils de Timurtasch était très sensible à l’amitié que le roi de la Chine lui témoignait ; mais il lui répondit : « Seigneur, laissez-moi de grâce m’exposer au péril dont vous voulez me détourner. Plus il est grand et plus il a de quoi me tenter. Je vous avouerai même que la cruauté de la princesse flatte en secret mon amour. Je me fais un plaisir charmant de penser que je suis peut-être l’heureux mortel qui doit triompher de cette orgueilleuse. Au nom de Dieu, poursuivit-il, que votre majesté cesse de combattre un dessein que ma gloire, mon repos et ma vie veulent que j’exécute ; car enfin je ne puis vivre si je n’obtiens Tourandocte. »

Altoun-Kan voyant Calaf inébranlable dans sa résolution, en fut vivement affligé : « Ah ! jeune audacieux, lui dit-il, ta perte est assurée, puisque tu t’opiniâtres à demander ma fille. Le ciel m’est témoin que j’ai fait tout mon possible pour t’inspirer des sentiments raisonnables. Tu rejettes mes conseils, et aimes mieux périr que de les suivre. N’en parlons donc plus. Tu recevras bientôt le prix de ta folle constance. Je consens que tu entreprennes de répondre aux questions de Tourandocte. Mais il faut auparavant que je te fasse les honneurs que j’ai coutume de faire aux princes qui recherchent mon alliance. »

À ces mots, il appela le chef du premier corps de ses eunuques ; il lui ordonna de mener Calaf dans le palais du prince, et de lui donner deux cents eunuques pour le servir.