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CONTES ORIENTAUX

vous êtes en sûreté et où rien ne vous manque, je suive le mouvement qui m’enlraîne, ou plutôt que je m’abandonne au ciel qui me conduit. — Va, mon fils, lui dit Timurtasch, cède au noble transport qui t’agite ; cours au sort qui t’attend ; hâte par la vertu la lente prospérité qui doit succéder à notre infortune ; ou par un beau trépas, mérite une place éclatante dans l’histoire des princes malheureux. Pars, nous attendrons de tes nouvelles dans cette tribu, et nous réglerons notre fortune sur la tienne. »

Le jeune prince des Nogaïs embrassa son père et sa mère, et prit le chemin de la Chine. Il n’est point marqué dans les auteurs qu’il éprouva quelque aventure sur la route ; ils disent seulement qu’étant arrivé à la grande ville de Canbalec, autrement Pékin, il descendit auprès d’une maison qui était à l’entrée et où demeurait une petite vieille qui était veuve. Calaf se présenta à la porte ; aussitôt la vieille parut. Il la salua et lui dit : « Ma bonne mère, voudriez-vous bien recevoir chez vous un étranger ? Si vous pouvez me donner un logement dans votre maison, j’ose vous assurer que vous n’en aurez point de chagrin. » La vieille envisagea le jeune prince, et jugeant à sa bonne mine, ainsi qu’à son habillement, que ce n’était pas un hôte à dédaigner, elle lui fit une profonde inclination de tête et lui répondit : « Jeune étranger de grande apparence, ma maison est à votre service aussi bien que tout ce qu’il y a dedans. — Et avez-vous, reprit-il, un lieu propre à mettre mon cheval ? — Oui, dit-elle, j’en ai. » En même temps elle prit le cheval par la bride et le mena dans une petite écurie qui était sur le derrière de sa maison. Ensuite elle revint trouver Calaf, qui se sentant beaucoup d’appétit, lui demanda si elle n’avait personne qui pût lui aller acheter