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LES MILLE ET UN JOURS

fût. Le sultan y consentit ; le traité fut fait ; le commandant regagna son quartier, et le jour suivant, lorsqu’il fallut retourner à la charge, on vit tout à coup les Circassiens se détacher de leurs alliés, et réprendre le chemin de leur pays.

Cette trahison causa beaucoup de chagrin au prince Calaf qui, se voyant alors beaucoup plus faible que le sultan, aurait fort souhaité d’éviter le combat ; mais il n’y eut pas moyen. Les Carizmiens attaquèrent brusquement, et profitant du terrain qui leur permettait de s’étendre, ils enveloppèrent de toutes parts les Nogaïs. Ceux-ci cependant, quoique abandonnés de leurs meilleures troupes auxiliaires et environnés d’ennemis, ne perdirent pas courage. Animés par l’exemple de leur prince, ils se serrèrent, et soutinrent longtemps les plus vives charges du sultan ; ils furent toutefois enfoncés, et alors Calaf, désespérant de remporter la victoire, ne songea plus qu’à échapper à son ennemi. Il choisit quelques escadrons, et se mettant à leur tête, il se fit jour au travers des Carizmiens. Le sultan, averti de sa retraite, détacha six mille chevaux pour le poursuivre ; mais il trompa leur poursuite en prenant des chemins qui ne leur étaient pas connus ; enfin il arriva peu de jours après la bataille à la cour de son père, où il répandit la tristesse et la terreur, en apprenant le malheur qui lui était arrivé.

Si cette nouvelle affligea Timurtasch, celle qu’on reçut bientôt après acheva de le mettre au désespoir. Un officier échappé du combat vint dire que le sultan de Carizme avait fait passer sous le sabre presque tous les Nogaïs, et qu’il s’avançait à grandes journées, dans la résolution de faire mourir toute la famille du kan et de soumettre la nation à son obéissance. Le kan se repentit alors d’avoir refusé de payer le tribut ;