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CONTES ORIENTAUX

même de n’en supprimer aucune circonstance. » Alors le fils d’Abdallah commença le récit de ses aventures : Il avoua qu’il n’était point fils de Massaoud, et qu’il avait eu recours à l’imposture pour s’assurer la possession de Dilara. « Mais, ajouta-t-il, mon mensonge n’a pas eu tout l’effet que j’en attendais ; on a envoyé à Cogende un courrier qui sera de retour dans trois jours : ainsi le cadi, qui nous fait garder à vue, découvrira bientôt ma fourberie et m’en punira par une mort infâme. Cette mort pourtant n’est pas ce qui m’afflige ; c’est l’approche du funeste moment qui doit pour jamais me séparer de l’ojet que j’aime : cette seule pensée fait toute ma peine. »

Pendant qu’il tenait ce discours qu’il entremêlait de soupirs et de larmes, la dame de son côté fondait en pleurs et faisait assez connaître par la douleur dont elle paraissait saisie, qu’elle était dans les mêmes sentiments que Couloufe. L’officier du roi ne vit pas ce spectacle sans compassion : « Tendres époux, dit-il, je suis touché de votre affliction. Je voudrais pouvoir vous rendre service et vous empêcher tous deux de boire la coupe empoisonnée de malheur de la séparation. Plût à Dieu, jeune homme, que je pusse vous soustraire au danger que vous courez ; mais cela me paraît bien difficile. Le cadi est un juge vigilant, et il ne vous pardonnera point de l’avoir trompé. Tout ce que j’ai à vous conseiller, c’est de mettre votre confiance en Dieu, qui sait ouvrir les portes les mieux fermées et lever les plus insurmontables difficultés. Implorez son secours par de ferventes prières, et ne désespérez pas de sortir heureusement de cette affaire, bien que vous n’y voyiez aucune apparence. » À ces mots l’officier prit congé de Couloufe et de la dame, et se retira.