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LES MILLE ET UN JOURS

Dès que Couloufe eut achevé ces paroles, le cadi lui dit : « Vous êtes fils unique d’un riche marchand de Cogende, et ce n’est que par l’accident que vous venez de raconter que vous êtes dans la misère ? — Assurément, répondit le fils d’Abdallah. Vous voyez bien, monseigneur, que je ne suis pas un misérable élevé dans la poussière. — Eh ! pourquoi, jeune homme, reprit le juge, n’avez-vous pas déclaré cela hier ! Je ne vous aurais pas fait maltraiter. Seigneur, ajouta-t-il en se tournant vers Mouzaffer, ce que dit le hulla change de thèse ; étant fils unique d’un gros marchand, les lois ne permettent pas qu’on le force à répudier sa femme. — Bon ! seigneur cadi, interrompit Taher, est-ce que vous ajoutez foi à cet imposteur ? Il se dit fils de Massaoud pour éviter les coups de bâton et gagner du temps. — Je n’y saurais que faire, dit le juge ; soit qu’il mente, soit qu’il dise la vérité, il m’est défendu de passer outre : tout ce que je puis ordonner de plus favorable pour vous, c’est d’enjoindre au hulla de prouver ce qu’il avance. — Nous n’en demandons pas davantage, dit alors Mouzaffer. Je veux bien même qu’à mes dépens on envoie un exprés à Cogende ; je connais Massaoud pour l’avoir vu ici quelquefois : je sais bien que c’est un marchand très riche ; si le hulla est effectivement son fils, nous lui abandonnons Dilara. — Oui, dit Taher ; mais en attendant le retour du courrier, il serait à propos, ce me semble, de faire vivre les époux séparément. — Cela est contre les règles, repartit le cadi ; la femme doit demeurer avec son mari ; ou ne saurait la lui enlever sans commettre une violence condamnée par les lois. Envoyés donc un homme à Cogende, qui n’est qu’à sept journées d’ici. Dans quinze jours nous saurons ce que nous devons penser du hulla. S’il est fils de Massaoud,