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LES MILLE ET UN JOURS

démentie, et elle ne put s’empêcher de le croire lorsqu’elle vit paraître son premier mari. Elle se mit, à sa vue, dans la pensée qu’il venait lui annoncer cette nouvelle affreuse. Son visage se couvrit d’une pâleur mortelle, et peu s’en fallut qu’elle ne tombât évanouie. Taher se laissa tromper à ces marques de douleur. Il s’imagina que quelqu’un avait déjà dit à la dame que le hulla refusait de la répudier, et que ce refus était la cause de cette profonde affliction dont elle paraissait saisie. « Madame, lui dit-il, ne vous abandonnez point à votre tristesse. Il n’est pas encore temps de vous désespérer. Le misérable que j’ai choisi pour hulla, ne veut pas à la vérité vous céder à mon amour ; mais que cela ne vous chagrine point. Il a déjà reçu cent coups de bâton, et demain il en aura bien davantage s’il s’obstine à ne pas faire les choses dont il est convenu avec le nayb. Le cadi même est dans la résolution de lui faire éprouver les derniers supplices. Consolez-vous donc, ma sultane, vous n’avez plus que cette nuit à passer avec le hulla ; dès demain je redeviendrai votre époux. Je viens vous rassurer moi-même et vous exhorter à prendre patience ; car je ne doute pas que la nécessité de souffrir ce gueux-là ne soit pour vous une grande mortification. — Oui, seigneur, interrompit Dilara, je vous avoue que le hulla fait toute ma peine. Le repos de ma vie dépend de lui. Hélas ! je crains que cette affaire ne tourne pas au gré de mes désirs. — Pardonnez-moi, ma reine, reprit-il avec précipation, calmez une inquiétude si obligeante pour Taher. Vous pouvez vous flatter que demain notre union sera rétablie. » En achevant ces paroles, il sortit de l’appartement de la dame, et Couloufe y entra un moment après.

Sitôt qu’elle aperçut le fils d’Abdallah, elle passa