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LES MILLE ET UN JOURS

une union que protègent les lois. — Ah ! c’en est trop, interrompit en cet endroit l’impétueux Taher, qui avait eu bien de la peine à se contraindre et à se taire jusque-là ; menons ce misérable chez le cadi, et faisons-le traiter comme il le mérite. Nous allons voir s’il est permis d’abuser d’honnêtes gens par de vaines promesses. » Danischemend et Mouzaffer essayèrent encore de persuader au hulla qu’il devait de bonne grâce faire ce qu’ils souhaitaient ; mais n’en pouvant venir à bout, ils le menèrent devant le cadi.

Ils informèrent ce juge de tout ce qui s’était passé, et sur leur rapport le cadi regardant Couloufe, lui parla dans ces termes : « Jeune étranger que personne ne connaît dans cette ville, et qui vivait dans une mosquée des aumônes que nos ministres te donnaient chaque jour, as-tu perdu le jugement jusqu’à t’imaginer que tu demeureras tranquille possesseur d’une dame qui a été l’épouse de Taher ? Le fils du plus riche marchand de Samarcande verrait une femme qu’il aime et qu’il a eut reprendre, entre les bras d’un malheureux dont la naissance basse est peut-être le moindre défaut ! Rentre en toi-même et te rends justice. Tu n’es pas d’une condition égale à celle de ta femme, et quand tu serais d’un rang au-dessus même de celui de Taher, il suffit que tu ne sois pas en état de faire la dépense qu’il convient à une honnête famille pour que je ne te permette pas de vivre avec ta femme. Renonce donc à la folle espérance que tu as conçue et qui t’a fait violer un serment ; accepte l’offre du seigneur Mouzaffer, répudie ta femme et t’en retourne à ta patrie, ou bien, si tu t’obstines à n’y vouloir pas consentir, prépare-toi à recevoir tout à l’heure cent coups de bâton. »

Le discours du cadi, bien que prononcé d’un ton