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CONTES ORIENTAUX

parole qui choque l’amour et la raison. — Mais, madame, reprit-il, est-ce qu’il dépend de moi de vous conserver à ma tendresse ? Quand même je violerais mon serment, croyez-vous qu’un étranger sans appui, sans bien, puisse résister au crédit de Mouzaffer ? — Oui, répondit la fille de Boyruc, vous le pouvez méprisez ses menaces ; rejetez ses offres : les lois sont pour vous. Si vous avez de la fermeté, vous rendrez inutiles tous les efforts qu’on fera pour nous désunir. — Eh bien ! ma princesse, dit-il, emporté par sa passion, vous serez satisfaite. Mon serment, en effet, est téméraire, et je sens bien que je ne puis le garder sans qu’il m’en coûte le repos de ma vie. C’en est fait, je ne vous répudierai point, puisque je puis m’en défendre. C’est la résolution que je prends. Je défie Mouzaffer et toute la terre ensemble de m’en détourner. »

Tandis qu’il assurait sa femme et qu’il se promettait à lui-même de demeurer ferme dans ce dessein, Taher, à qui la nuit avait paru beaucoup plus longue qu’à eux, vint aussi frapper à la porte de leur chambre. « Allons donc, hulla, s’écria-t-il, le jour s’avance. On vous a déjà averti de vous lever, vous vous faites bien presser ; il y a longtemps que nous vous attendons pour vous remercier et vous compter la somme promise. Habillez-vous promptement, que nous terminions cette affaire, le lieutenant du cadi sera ici dans un moment. » Couloufe se leva aussitôt, se revêtit de ses habits, et ouvrit la porte à Taher, qui le fit conduire au bain et servir par un esclave grec. Lorsque le fils d’Abdallah fut sorti du bain, l’esclave lui donna du beau linge et une robe très-propre et le mena ensuite dans une salle où était Mouzaffer avec son fils et Danischemend. Ils saluèrent le hulla