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LES MILLE ET UN JOURS

suis un enfant de famille de Damas. J’ai eu envie de vovager. Je suis venu en Tartarie, et à quelques lieues de Samarcande, j’ai rencontré des voleurs qui ont tué mes domestiques et m’ont volé. »

Mouzaffer, après avoir écouté Couloufe, le crut, et lui dit : « Ne t’afflige pas ; les bonnes aventures sont enchaînées aux mauvaises : tu pourras trouver ici de quoi te consoler ; lève-toi et me suis jusqu’à ma maison. » Le fils d’Abdallah fit ce qu’on lui disait, et il jugea quand il fut chez le marchand que Mouzaffer devait être un homme fort riche. Un magasin rempli des plus riches étoffes, des meubles précieux et un très grand nombre de domestiques qui s’offrirent à sa vue, lui firent porter ce jugement. Et il ne se trompait pas : Mouzaffer avait des biens considérables.

Ce marchand fit asseoir à table auprès de lui Couloufe et lui présenta d’abord du sorbet. Puis on leur servit du blanc-manger et des viandes fort succulentes. Après le dîner, ils s’entretinrent tous deux, et Mouzaffer ensuite le renvoya avec quelques présents.

Le lendemain, le marchand retourna dans la même mosquée. Il prit le fils d’Abdallah, le mena encore chez lui et le régala comme le jour précédent. Il se trouva là un docteur nommé Danischemend, qui, tirant à part Couloufe après le repas, lui parla dans ces termes : « Jeune étranger, le seigneur Mouzaffer, le maître de cette maison, a un grand dessein sur toi ; un dessein qui demande une prompte exécution et qui doit te faire plaisir dans l’état où sont tes affaires. Tu sauras qu’il a un fils unique appelé Taher, qui est un jeune homme d’un naturel fort violent. Ce Taher a épousé depuis quelques jours la fille d’un grand seigneur étranger. Le mari, suivant son humeur