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CONTES ORIENTAUX

plus à moi, il est à vous, madame. — Catalpan, dit-il au roi, je ne suis plus ton maître, voilà la maîtresse. » À ces mots, le prince s’approcha de la dame, lui baisa la main, et lui dit : « Madame, je suis à présent votre esclave, et déjà je me sens disposé à vous servir avec beaucoup de zèle. »

Elle accepta Mirgehan pour esclave. « Seigneur, dit-elle à Couloufe, je regarde ce garçon-là comme un bien qui m’appartient ; mais trouvez bon que je le mette en dépôt entre vos mains. Il demeurera chez vous, et vous me l’amènerez toutes les fois que vous viendrez ici. Je ne puis le garder dans ma maison, parce qu’on sait que c’est votre esclave. Tout le monde le connaît pour cela. Si on le voyait passer de votre service au mien, on en pourrait tenir de mauvais discours, et j’ai de grandes mesures à garder. »

Après avoir quelque temps encore continué cette conversation, Couloufe et Dilara s’assirent à la table pour souper, et le roi se tint debont devant eux. Comme ce prince réjouissait la dame par mille plaisanteries, elle dit au favori : « Seignaur, permettez que ce garçon mange et boive avec nous. — Madame, répondit Couloufe, il ne mange pas ordinairement avec moi. — Ne soyez pas si rigoureux, reprit la dame, souffrez que nous buvions ensemble, afin qu’il vous en aime davantage. — Mets-toi donc là, Catalpan, dit le fils d’Abdallah, puisque madame le veut absolument. »

Le faux esclave ne se le fit pas dire deux fois. Il s’assit entre Couloufe et l’aimable fille de Boyruc. Il mangea, et lorsqu’on eut apporté le vin, la dame en remplit une coupe jusqu’au bord, et la lui présentant : « Tiens, Catalpan, lui dit-elle, bois cette rasade