Page:Les Merveilleux Voyages de Marco Polo, éd. Turpaud, 1920.djvu/88

Cette page a été validée par deux contributeurs.

brûler ma fille plutôt que de la lui donner pour femme. Il mérite que je le fasse mourir puisqu’il est traître et déloyal envers moi, son seigneur. » Il dit ensuite aux messagers de partir sur le champ et de ne jamais revenir devant lui. Ils obéirent et allèrent tant qu’ils revinrent à leur maître. Ils lui contèrent tout ce que le Prêtre Jean lui mandait, sans en rien cacher.

Quand Gengis-Khan sut le grand affront que lui avait fait le Prêtre Jean, son cœur fut si gonflé de colère qu’il faillit en éclater, car c’était un homme de trop noble rang. Il put enfin parler et, d’une voix si élevée que tous les assistants l’entendirent, il déclara qu’il ne garderait pas la royauté s’il ne tirait de l’affront que lui avait fait le Prêtre Jean la réparation la plus éclatante. Jamais injure ne serait si chèrement payée. Bientôt il ferait voir à son insulteur s’il était son serf.

Aussitôt, convoquant ses guerriers et ses fidèles, il fit les plus grands préparatifs qui jamais furent vus et avertit le Prêtre Jean d’avoir à se défendre. Quand celui-ci sut que Gengis-Khan marchait contre lui avec une si puissante armée, il crut que c’était fanfaronade et forfanterie, car il disait que son adversaire n’était pas un homme d’armes. Toutefois il mit sur pied son armée et convoqua tous ses gens ; il faisait de grands préparatifs dans le dessein, si Gengis-Khan venait, de s’emparer de lui et de le mettre à mort. Sachez qu’il réunit une si grande armée de toutes sortes de soldats étrangers que ce fut la plus grande merveille du monde.