Page:Les Merveilleux Voyages de Marco Polo, éd. Turpaud, 1920.djvu/63

Cette page a été validée par deux contributeurs.

des et qu’il les eût prises toutes trois, ils avaient compris alors qu’il était vraiment dieu, vraiment roi et vraiment sauveur. La foi était donc née à ce moment en leur âme ; il fallait qu’elle y restât solide comme une pierre. C’est pourquoi l’enfant, qui connaissait leurs pensées, leur avait fait ce don. Mais eux, ne comprenant pas le symbole, jetèrent l’objet dans un puits. Aussitôt descendit du ciel une flamme ardente qui s’y enfonça.

Les trois rois, voyant ce miracle, se repentirent d’avoir jeté la pierre, car ils comprirent alors le symbole dans sa grandeur et son excellence. Ils prirent donc de ce feu et l’emportèrent dans leur pays où ils le mirent dans un temple richement orné. Là on l’entretient et on l’adore comme un dieu. Tous les sacrifices que font les habitants, ils les font consumer dans ce feu. Et si parfois ils le laissent s’éteindre, ils s’en vont dans les cités voisines qui partagent leur foi, se font donner de leur feu et le rapportent en leur temple. Telle est la raison pour laquelle les gens de cette contrée adorent le feu. Et certaines fois ils vont jusqu’à dix journées de marche pour en trouver.

Voilà ce que racontèrent à Messire Marco Polo les habitants de ce château et ils lui affirmèrent avec serment que les choses s’étaient bien passées comme ils le disaient[1]. Ils ajoutèrent que l’un des trois rois régnait dans une cité du nom de Saba, un autre à Awah et le troisième dans ce château où l’on adorait le feu.

  1. On voit que Marco Polo, non sans raison, leur laisse la responsabilité de ce récit.