Page:Les Merveilleux Voyages de Marco Polo, éd. Turpaud, 1920.djvu/228

Cette page a été validée par deux contributeurs.

se dirige vers le Sud est si fort et si constant qu’il leur serait impossible de revenir. Pour aller de Maabar, à Madagascar et à Zanquibar, les navires, malgré la grande distance, ne mettent que vingt jours ; mais, pour retourner, il leur faut trois mois, car ils ont à lutter contre la violence du courant.

Dans les autres îles qui se trouvent plus au midi et où les marchands ne vont jamais par crainte de n’en pouvoir revenir, on dit qu’à certaines saisons de l’année se montrent les oiseaux Grif[1]. Ils ne sont point faits nomme nous le disons. Des marins qui sont allés là-bas et les ont vus ont raconté à messire Marco Polo qu’ils ressemblent à l’aigle, mais sont plus grands et d’envergure plus large. Leurs ailes couvrent trente pas et leurs plumes sont longues de dix pas. Ils sont assez forts pour saisir un éléphant entre leurs serres et l’enlever à une grande hauteur, ils le laissent alors retomber et quand il est mort, ils se repaissent de sa chair. Les indigènes les appellent nur[2]. Je ne sais si ce sont les oiseaux que nous connaissons sous le nom de griffons. En tout cas, ils ne sont point moitié aigle, moitié lion.

Le grand Khan envoya dans ces régions pour s’informer de ces merveilles et aussi pour délivrer un de ses messagers qui y avait été retenu. Les hommes à qui il confia cette mission délivrèrent le captif et firent au grand Khan les étonnants récits que j’ai reproduits. Ils rapportèrent aussi deux défenses de sanglier qui

  1. Les griffons.
  2. C’est l’oiseau roch des Mille et une Nuits.