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reuses & pleines d’humanité. On ne regarderoit plus chaque pays comme indépendant des autres, mais comme un tout indivisible. On ne se borneroit plus à l’amour de sa patrie, le cœur s’étendroit, deviendroit immense, & par une amitié universelle embrasseroit tous les hommes. De-là naîtroient l’affection pour les étrangers, la confiance mutuelle entre les nations voisines, la bonne foi, la justice & la paix parmi les princes de l’univers & entre les particuliers de chaque état.

Mais si l’humanité est incapable de cette perfection, du-moins un prince sage sentira-t-il aisément, que la gloire de la royauté est de gouverner les hommes de façon à les rendre bons & heureux ; que son autorité n’est jamais mieux affermie que lorsqu’elle est fondée sur l’amour des peuples : que la richesse la plus certaine & la plus constante consiste à retrancher tous les faux besoins de la vie, pour se contenter du nécessaire & des plaisirs simples & innocens de la nature : que les trois colonnes d’un état sont l’agriculture, le commerce & les sciences : que la vie active du sujet est le bien du monarque.

Un roi persuadé de ces vérités, & dont l’âme est aussi grande que son pouvoir, choisit hardi-