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LES JÉSUITES


supérieur qui fit dire un grand nombre de prières et de messes pour exorciser l’esprit follet qu’il voyoit souvent dans la chambre des pères jésuites faire mille grimaces effroyables.

Le bon religieux, ayant représenté à la société le danger qu’il y avoit d’entretenir de la sorte un lutin, résolut de ne plus entrer dans leurs appartemens. Ce qui les contenta extrêmement ; car, comme disoit quelquefois cette jeune fille dont l’humeur étoit d’un enjouement charmant : que vient faire ici ce vieux lutin avec ses grosses paternostres et son eau bénite ; que ne la va-t-il porter aux capucines, ses bonnes amies, afin qu’elles lui donnent un rosaire pour l’amuser ? Mais un soir, comme il étoit solitaire dans l’église, et qu’il disoit son bréviaire, l’esprit follet s’avisa de le suivre par l’avis que quelques pères lui donnèrent. Jamais homme ne se trouva plus effrayé en voyant devant lui sauter, rire, folâtrer et chanter ce petit diablotin qui étoit ce soir-là tout noir sans réserve, depuis les pieds jusqu’à la tête, avec une grande barbe blanche qu’on lui avoit attachée. Le père gardien qui l’entendit crier en fut touché vivement, et le trouvant tombé comme en foiblesse de peur, il lui présenta de l’eau impériale qui le fit revenir. Après quoi il lui dit en riant : Est-il possible, mon père, qu’une personne comme vous, aussi sublime