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LES JÉSUITES


de son côté, le jésuite lui dit adieu contrefaisant l’enrhumé. — Adieu, père Ravissant, lui repartit-elle d’un air languissant, ne me venez plus voir avec cet habit à la soldate : vous valez mille fois mieux avec celui de jésuite, qui vous donne un je ne sais quoi de charmant et de vaillant quand vous êtes avec une femme. Le religieux, qui étoit si hors de lui-même de tous les plaisirs qu’il avoit goûtés, ne répondit rien, mais l’ayant saluée fort respectueusement en lui baisant la main, il la quitta.

Il étoit environ quatre heures du matin quand il entra dans la maison professe le plus doucement qu’il pût. Le père Bourdaloue qui avoit fait la sentinelle pour lui, avoit mis toute chose en ordre, afin qu’il ne fît point de bruit, et que le père supérieur, qui dort très-peu, ne l’entendît point ; car, quelle honte auroit-ce été pour le père gardien, qui doit servir d’exemple à toute la sainte société, et les corriger de leurs vices, de le voir courir les rues après minuit comme un loup-garou, qui cependant attrape le mouton qu’il cherchoit. Les deux pères s’étant mis au lit ensemble, raisonnèrent de leur bonne fortune ; mais le père gardien ne se pouvoit empêcher particulièrement d’admirer les beautés de la dame qu’il venoit de quitter. Cette idée le réveilloit à tous momens comme hors de lui-même, et lui donnant des saillies amoureuses, faisoit rire le père Bourdaloue, dont