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LES JÉSUITES


soit ; et comme elle étoit fort jeune, elle n’en connoissoit point d’autre, et l’on m’a assuré que c’étoit son véritable père, et qu’il avoit eu cette fille, qu’il appeloit sa nièce, d’une veuve, la femme d’un parfumeur nommé Thierry, qu’il avoit débauchée après la mort de son mari, et qui étoit aussi morte. Enfin l’aimable nièce étoit caressée tendrement de son oncle jour et nuit, et quelques-uns de mes amis le surprirent un jour comme il la tenoit entre ses bras, et qu’il lui disoit tout charmé : Mon joli tendron ! m’aimes-tu comme ton galant ? — Eh ! comment le pourrois-je faire, repartit-elle en rougissant, vous êtes mon père ! — Il n’importe, ma fille, répondit le jésuite, je vous dispense du péché que vous croyez commettre en m’aimant comme tel.

La jeune fille se défendit longtems avec beaucoup de vertu et de sagesse sur ce chapitre ; mais hélas ! l’eau qui tombe goutte à goutte perce le plus dur rocher, et le tems est maître de tout. Elle se rendit enfin et devint sa femme ; et il en eut encore deux ou trois enfans, qu’il trouvoit moyen de mettre en nourrice dans des villages fort éloignés de Paris sous un nom inconnu ; après quoi il la maria à un orfèvre qui étoit grand ami des moines de Saint-Denis, où le mariage fut célébré. La pauvre fille avoit bien besoin d’une grande mesure pour rétrécir l’entrée de son martinet qui avoit