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il’ailloiirs, quel roi imissanl de la terre peiil se direà l’abri îles alleiiiles l)mir( ;eoises du rhume de cerveau ?

Mais, hélas ! à mesure que les siècles ont marché, lliuinanité s’est aggloméiée comme une immense boule de neige. Alors, les pelouses en fleurs ont fait place à des sentiers rudes et escarpés ; désormais chacun se presse , se coudoie et cherche à supplanter son voisin. « (ite-toi de là que je m’y mette !» devient la devise à la mode, et l’égoïsme une nécessité vitale. Etcomnienten serait-il autrement, lorscpie la moindre place vacante ne compte pas moins de deux cents rivaux béants ? lorsque tout sedispute avec une ardeur sans égale, poi leltuillesde iiiinislie et bureaux de tabac ? Quand il y a vingt fois plus d’avocats que de procès à perdre, de peintres que de portraits à faire, de soldats que de victoires à gagner, de médecins que de malades à tuer ! quand toutes les issues sont envahies, assiégées, escaladées, encombrées !


Sous l’Empire, ou il était convenu (|ue passer toute sa vie à s’exposera la mort constituait une position sociale, le canon faisait de larges trouées dans cet amoncellement déjeunes hommes sans direction et sans choix. Mais à présent (pie l’humeur belliqueuse n’est plus à l’indrc du Jour, il ne reste à la Jeunesse que deux rairières à remplir :1e barreau et la médecine. Or,couiuie pour y arriver il fairl , à toute force, passer par des chemins qui ne sont pas touJoLus bordés de roses : comme, en outre, ces deux professions regorgent déjà d’une quantité inouie de pauvres diables qu’on voit se disputer clients et malades avec tout l’acharnement d’un appétit qui frise le jeune, il suit de là que nouibre de plumes taillées pour pi-endre des noies au cours de M. Orfila finissent par rimer des élégies, et qu’Luie foule de i :aiiicrs achetés dans l’origine pour rédiger les leçons de M. Du Cauri’oy servent , en définitive, à recevoir un plan de vaudeville, à eiuegistrer un scénario de mélodrame. — Car c’est encore là une de ces mille erreurs passées, grâce à un fréquent u.sage, à l’étal de vérités absolues : on ne naît point poêle. Avez-ous oui dire (|uc M. de Lamartine ait fait des vers au maillot, ou (|ue M. de Chateaubriand ait salué anlrcment que par des cris et des pleurs la venue de sa première dent ? Donc, sur trois mille jeunes gens que la province envoie cluKiue année à Paris, ce iMinolaurede pierre, on en compte huit ou dix à peine qui dél !ar<|uenl dans la cour des messageries avec rintention formelle de se faire littérateurs. Le reste arrive sous le |)rétexle d’étudier le droilou la médecine, et ce n’est (|u’après s’être écorchés aux épines de ces deux sciences, après avoir absorbé l’argent des inscriptions, que, du ciel, ini beau matin, s’imaginant ressentir rinfliieiice secrète, ils enfourclient leur plume comme un coursier (|ui doit les mener rapidrint-nt à la gloire et à la fortune, et s’embarquent joyeusement dans leur encrier, dont ils transforment les petites vagues noires en flots dorés du Pactole.

L’Odyssée d’un débutant littéraire étant relie, à c|uelqiics ciiconslances près, de tous les débutants imaginables, nous allons racoiiler riiisioirc (i’Iiuiièiic Préval. un débutant de ces dernières années. .Ih uno diacc omncs.

Vers la fin de 1834, Eugène Préval, le cu’iir plein et la bourse vide, moula en diligence, et, pour la |iremièie fois de sa vie, dit adieu à sa famille cl à sa pelile