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12 i.A (1 liisiM ri :.

ft’iiêtie, |)oiir k- luuuiuii de l’oiseau qui cliante dans sa cage, pour le boU(|uet de violelle qu’elle aclicle cluKiue luatin, poui’ celle chaussuie si luisante et si hien lenue, pour celle élégance soulenue des pieds a la lôle, dont sérail lière plus d’une reine de |)réfecttiie, la grisetie parisienne ga^’ne ii peine de (|uoi fournir elia(|uejoni- au déjeuner d’un surnuméraire du ministère de l’intérieui-. Et cependantavecsi peu, si |)eu que rien, elle est bien plus riche, elle est gaie, elle est heureuse ; elle ne demande en son cheniiu ()u’un peu de bienveillance, un peu d’amour. Ce n’est pas (jucdans ce chemin, ou plutôt dans ce modeste sentier, semé de lani de fleurs des champs et de tant d’épines, qu’elle pai’court d’un pas si léger, l’ainiablc lille, elle ne rencontre bien des petits bonheurs à sa taille et a sou usage. Elle se pare de cet or ijuc fabrique à si peu de frais la médiocrité, et l’or de cette mine est plus inépuisable que toutes les mines du Pérou. Elle est contente de peu, elle est contente de rien ! La poésie et l’amour, ces deux anges qui consolent et qui encouragent, l’accompagnent dans sa route ; elle tient à la poésie par sa misère d’abord et ensuite par sa profession, elle tient a l’amour par ses grâces naturelles et sa beauté sans fard. La grisette est la providence de cette race à part et imberbe, l’honneur, l’esprit et le tapage de nos écoles, qu’on peut appeler a bon droit le prhikmps de l’année ; elle est l’amour souriant et désintéressé des poêles sans maîtresses, des oiateursen heibe, des généraux sans épée, des Mirabeaux sans tribune ;’,lout jeune homme qui vit à Paris d’une maigre pension paternelle et d’espérance est de droit le vainqueur et le tyran de ces jolies petites marquises de la rue Vivienne. Dans cette franche communaulé fondée sur l’amour, sur l’économie elle travail, chacun des deux amoureux apporte tout ce qu’il a, rien d’abord, et avec cela un grand appétit, et par-dessus le marché un grand fonds d’insouciance, tous les adorables ingrédients du bonheur ; on travaille chacun de son côté toute la semaine ; l’aiguille et la plume font des merveilles ; l’un dissèque des cadavres, l’autre en habille ; celui-ci débrouille les textes de Juslinien, celle-là redresse tous les torts féminins qu’on lui présente ; a peine a-t-on le temps de se voir, de s’entre-sourire ; à peine une fois ou deux passe-l-il devant la porte du magasin dont la glace est recouverte d’un rideau a demi entr’ouvert. Mais le dimanche venu, adieu toule contiainle ! rai ;,’uille et la plume se reposent, le magasin et le livre sont fermés ! Liberté, liberté toul entière ; c’est le jour on il est riche, c’est le jour où elle est belle, c’est le jour où ils s’aiment à ciel et ’a cœur ouveits. Allons, notre royaume légitime, la vallée de Montmorency nous appelle ; allons, notre beau duché de Saint-Cloud nous ouvre ses portes ; allons ; notre belle comté de Saint-Germain va grimper jusqu’à notre cinquième étage par le chemin de fer ; allons vite : j’ai mon habit neuf, mon gilet blanc, mes épargnes dans ma poche ; prends Ion chapeau le plus hais, ton écharpe la plus rose ; prends l’ombrelle que Louise a oubliéechez loi raul[ejour,elenavant ! Et les voilà qui s’emparent ainsi l’unelLaulre des plus petits recoins de la campagne parisienne ; pour leur faire place, à ces innoceuls amoureux, les oisifs et les riches se cachent de leur mieux, ils savent que le dimanche appartient !i l’étudiant et à la grisette ; et ainsi dans les campagnes, l’été, dans la ville, l’hiver, ils sont les maîtres sonveiains un |onr ihaipie semaine ; ils