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L’EMPLOYI’. 507

à (loiiiici’di’S vôloinenls ol du paiti ;i sa foiiinio, à ses oiiraiils ; il augiiiciilc de Imit un neuf coiils fiaïK’s les (|iiiiize cents fiancsdont l’enuraisse le Inidset do l’élal. Iclssoiil Icspiiniipaux types de l’employé. La vie de l’employé dans les départeinenls ditfèie un peu de relie (|u’il mène à Paris. D’ahord, prestjue tous les employés de proxinie sont mariés à trente ans ;

Car, qiio faire en tym iiicc, à moins qu’on s’y marie 7

el , mariés ou iiimi , ils sont ()lus heureux que leurs confrères delà capitale. L’a an moins l’exislence n’est pas matériellement impossible, et ils peuvent voir de lielies négociants cl d’aisi’s pro|iriélaircs vivre aussi solirement (jn’eux. Et puis, dans les petites villes de piovince, l’employé est entouréd’unc cerlaine considération. Garçon, ses quinze ou dix-huit cents francs font envie u Lien des mères, el plus d’une dcmoiselle le préfère il queliiue Lon marchand du pays, paice qu avec lui elle n’aura pas de magasin ii surveiller, parce qu’elle pourra dinei’a cinc] heures, parce qu’elle sera reçue à la pn lecture. Marié, il est invité, recherché, admis dans les maisons les pins considérables de la ville, sauf dans l’OEil-de-Bœuf de l’endroit, lorsqu’une particule bien positive ne précède pas son nom. Si sa fenune est jeune, jolie ou spirituelle, elle est l’intime de madaïue la Préfète, de madame la Générale, de madame la Sous-lntendanlc (pardonne. Académie, mais ces mots ont cours en province) ; il est de tous les dineis, el il va les jours des grandes et des petites soirées chez le recevem-^énéral. Quelle douce existence ! Et ce n’est pas tout. Chaque soir, quand le marchand aune encore ses mousselines, quand l’ouvrier regarde le ciel avec dépil, impalieni de voir le soleil disparaître ’a l’horizon , quand la couturière lalioiieuse redouble d’ardeur en s’apercevant qu’elle n’a pas encore gagné ses vingt sous, l’employé cl sa femme, frais, bien attifés, pimpants, vont se promener nonchalamment au jardin des plantes de l’endroit, "a l’esplanade, sur les lices, dans la campagne ; ou bien, si l’hiver est venu, ils se réunissent à d’autres enqdoyés pour jouer la bouillotte

i un centime la liche, caqueter, contrôler les dames du pays, lire les revues nouvelles,

et parler de leurs droils h l’avancement jusqu’à onze heures du soir. Cependant ces mêmes employés ne sont pas heureux, ils ont un chagrin, un ver rongeur dans l’imagination. Le croirait-on ? ils portent envie aux employés de Paris. (1 Ah ! si nous étions a Paris, on ne nous oublierait pas ainsi I se diseut-ils. Il n’y a d’avancement, de faveurs, de gratilicalions, que pour les employés de Paris. On gagne toujours quel<iue chose à vivre près du soleil. Quand pourrons-nous aller à Paris ? » Le jour vient enlin où, après mille privations préalables, il leur est possible de faire le grand voyage, et comme ils ont su capter la bienveillance des dépulés, pairs de France et lieutenants-généraux de toutes leurs résidences, ils ne doutent pas qu’en les faisant donner habilement, ils n’emportent la place objet de leurs vœux. Mais ici je m’arrête. On n’a pas oublié le désenchantement et l’exaspcv ration de l’infortuné Félicien. Ces déconvenues se renouvellent plus d’une fois tous les jouis.

On le voit donc, l’employé se plaint ’a Paris, il se plainten province, il n’est heureux.