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^70 LE MELOMANK.

/es fc(.’//fs, pour sa juliilatiou personnelle. C’élail iiiio affaire d’épanouisseraeiit de rate pUilôl que de gosier.

On enlonnaif de joyeux refrains à la suite des repas, el cela tout naturellement, de même que les canaris roucoulent au sortir de la manfjeoire. Afin de prolonger le plaisir, la moyenne des couplets était de quinze a vin ;;t, sans compter les chorus obligés. On peut dire qu’alors « tout finissait par des chansons » qui n’en finissaient pas.

Sous la république et sous l’empire, In Marseillaise, le Chant du départ, etc., imprimèrent aux refrains nationaux une direction patriotique et guerrière. Après l’invasion et dans les premiers temps do la restauialion. alors que le rhaiivinisme avait tout envahi, y compris les mouchoirs de poche et lu vaisselle, alors qu’on s’essuyait le front avec un pelolon de la vieille garde on avec la jambe d’un cosaque, que l’on mangeait une crème aux pistaches sur le champ de bataille d’EyIau et de la Moskowa, le chant, lui aussi, fut voué à In colonne, au (jrognard, à la (jloire, h la victoire et aux .shccc.s des Français. Plus lard, grâce a Béranger, il se transforma en moyen d’opposition politique. Aujourd’hui le chant est devenu généraleiiient une prétention, nous dirions presque un calcul. Il est bien entendu que nos précédentes appréciations, de même que celles qui vont suivre, ne s’appliquent point aux véritables artistes, lesquels ont toujours formé une classe h part, mais seulement aux amateurs. Maintenant on ne chante plus pour chanter, mais dans le but de briller, de se faire remarquer. C’est à peine si diins les repas de province on a cousoivé l’usage (l’adresser a la ronde aux convives l’iiivilali (m de chanter iinclijnr clwsc. Et même encore la prétention dilettanle a laii abandonner comme trop vulgaire ce (|u’oii ap|)elail jadis les chansons de table II n’y a plus que des chansons à table.

En guise de

.... joiieiis refrain

Qui mette tout le nioiide en Iraiii.

Tout en vidant les verres

Comme fais ;iieiit nos pères,

on entonne de langoureuses et plainlives romances, parfois même la cavatinc funèbre chantée par Rachel la Juive, ou par Ninelle de la Pic volruxc, avani de marcher an supplice. C’est Irès-réjouissaiil.

Dans un dîner départemental auquel nous assistions dernièrement, un Duprez de l’endroil jugea a propos de chanter au desserl le grand air iV.silc linâliiaire. Il enleva la lielliqueuse stretle Suivez-mni ! en brandissant sa fourclietlc au lieu d’épéc. C’estseulementdans les repas de pelites villes, lorsqu’arrive le moment de chanter à la ronde, qu’on voit se renouveler ces excellentes scènes de comédie, dont le proverbe de Henri Monuier, intilulé un Dîner bourgeois, nous a offert une peinture si plaisante et si vraie ; — lechantcur, faussement iiiodesie, ayani l’air de se défendre tandis qu’il grille de se faire-entendre dans ce <|n’ii considère comme son triomphe ;

— un autre se faisant supplier pendant une demi-heure, pour finir par détonner un chétif couplet ; — puis, les demoiselles conlrainles à ch.nilci par aulorilé malernelle