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I. A OAUDI-. 155

ilans sa sajiiîsse. Si l’on gralle (loiuvmeiU coiilro la serrure, ce serait nioiisieui- luiluêiiie (lu’il a IVappé Uo() fort. Klle ue laisse pas entrer une visite sans s’être bien assur<’<' iine la personne (jui se présente n’a sur elle aucune senteur, et sans vous recommander lie pai 1er Irés-has. In léi ;er liruil se fait-il entendre <lans la iiièee de ra|ipiirleiiii’iil la plus reculée, elle sort en fureur u pour aller faire taire ces gens-la (pii (iiil iliiniici un mal de lêle à madame. » Les soins qu’elle prodigue h lanière n’euipèclienl pulnl madame .laecpiemart de ciller sans lelàelie sui’ I enfant. C’est elle (]Ui indiipie la |ila(f m’i I dn doit poser le liercean du nouveau-né, qui prescrit la dose (le sucre, i|u il faut meiire dans le verre d’eau dont il va hoire quelques gouttes, qui préside "a tout ce qui concerne sa toilette, son sonnneii, etc. lùilin, du matin au soir, elle dirige, elle ordoime, cllceveice un em|iire absolu ; aussi parle-t^>lle en souveraine à la plupart des geus de la maison ; autant elle se montre gracieuse avec uue fenune de chambre qui paraît posséder la conliance de madame et celui qu’elle sait être chargé du soin de la cave, autant on la oit traiter impéiieusenient les autres domestiques quand ils ne se conforment pas h tous les petits soins qu’elle leur recommande sans cesse poui- faire croire à l’utilité <le sa présence, et son élonncmenl serait grand si quelipi’un le trouvait mauvais (piand il s’agit o de la vie d’une accouchée. »

Madame Jacquemart ne courbe [las seulement la domesticité sous son joug de fer, (tar ce joug s’étend aussi sur la maîtresse de la maison. Armée des ordonnances prescrites |)ai- le docteur, elle ne s’approche pas du lit sans dire : « il faut (jue madame boive, il faut que madame mange sa soupe, » ou toute autre chose qu’il lui semble ordonner a son tour. Bienheureux, si, peu satisfaite de cette douce illusion, elle n’entreprend point dans certains cas d indicpier quelque remède de bonne femme qu’elle assure avoii- fait emjiloyer souvent avec le plus grand succès. Ces mots : «Si ça ne fait pas de bien à madame, ça ne peut pas lui faire de mal, » sont ordinairement l’cxoide de ses propositions dans ce genre. Si la pauvre jeune femme a le malheur de s’y laisser prendre, madame .lacquemarl joint "a l’inqtortance de ses fonctions toute l’importance d’un véritable docteui’, ce qui double les moyens de gouverner ceux qui l’entourent. Sans com])ler qu’elle aime de passion à exercer la médecine. Gardez-vous de parler devant madame .lacquemarl de quelque douleur que ce soit, elle les a toutes éprouvées. Sur ce sujet, son savoir est inépuisable. Non-seulement elle vous entretiendra des diverses maladies de la femme, mais aussi des maladies des hommes, car elle les connaît par oui dire au moins, lorsqu’il ne lui piait pas de les mettre sur le compte de monsieur Jacquemart : pai’ suite, il n’en existe pas une dont elle ignore le traitement, elle serait en état de soigner les plus graves comme les plus légères : aussi dans une maison qu’elle habite on ne s’est jamais donné une entorse, elle n’a pas entendu tousser sans prescrire aussitôt le bain de pied qu’il faut préparer ou la tisane qu il faut boire, et sa mémoire est pleine dune telle quantité d’anecdotes, d’histoires extraordinaires dont le fond roule sur le chiendent, les sangsues et la bourrache, qu’on la prendrait volontiers pour un journal de thérapeutique ambulant.

Le désir de madame Jacquemart est que la mère nourrisse son enfant, parce qu’a-