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rédauuM- ses soins, el savoir au jusleà tiuoilo époque telle ou telle de ses elieiuos leiiveiia cliciclicr. A l’exeeplioii do ces sorties, madame Jacnuemart se passe liabituelleiiii’iil ilu plaisir de respirer un aif pur, puisipie, fùl-ce au mois de juillet, elle no poui’iait ouvrir une fem^tre que dans le cas extrême oii la ri’iiime ijuelle soigne éloulïeiail au point de se trouver mal.

Ajoute/ h tant de piivalions, la privation du simimeil peiidani une ; ;iaiiile moilié de l’année, le devoii- <pii l’assnjetlil ;i mille soins deiioùlanls. et eliaeun se dira : .Mailame Jae(|uemart esl la plus inforlunéi ; créature qui soit au monde. Kli bien I il n’eu est l’ien, surtout si, grâce a la protection de quelque célèbfe accoucheur, elle est parvenue ;i ne plus ? ;ardei’ ipiedes lenunes en couche.

Il esl bien certain que pendant plusieurs nnils. il lui est inlerdil de s eleiidre sur des matelas, ainsi que nous le faisons tous ; mais elle a coniraclé Ihabilnde. le soleil couché on non, de dormir îi merveille dans une bernère. dans un lauN’iiil. sni- une chaise ; au besoin même elle dormirait debout. Seulement Mor|>hée lui donne sa pari en petite monnaie au lieu de la lui payer en grosses pièces, et elle en soulîre si peu. que, dès qu’on la réveille pour réclamer d’elle quelque service, on la voit se dr-osser sur ses jambes d un air lout aussi jovial, tout aussi dispos que si elle s’éveillait iialnrellemenl après sept heures d’un sommeil suivi.

I, ’heure du déjeuner venue, on donne h madame Jac(|ueinart une énorme tasse de calé a la crème, l’.o moment est un des plus doux moments de sa joiunée ; car un sort bienfaisant a voulu (pie madame Jacipieuiart fût gourmande : de Ixnis repas sont pour elle une immense compensation "a ce ([ue son existence sendile avoir de pou agréable. Vivant toujours chez dos personnes riches, ou pour le moins chez des |)ersonnes (|ui sont dans l’aisance, chaque jour, avec délices, elle prend sa part de différents mets succulents dont elle ne pourrait se régaler dans son petit ménage. Ou la soigne ; elle se ferait soigner d’ailleurs, et parle sans cesse de la bonne maison dont elle soil. alin de pitpier d’amoui-propre les gens chez qui elle so trouve. A son diiier, a son repas du soir, et «luelquelois même dans la journée, un verre de bon vin vient égayer son esprit et réparer ses forces. Elle a de plus sa tabatière, dans la- (jneile elle puise loulos les cinq minutes une distraction qui lui jilaît inliniinent, et qui a l’avanlage de la tenir éveillée ; sans compter onlin la douce satisfaction do ne point travailler de l’aiguille du matin au soir, ainsi que le fait une pauvre ouvrière pour gagner vingt sous dans sa journée.

Mais, dira-t-on, je ne vois pas dans tout cela une seule jouissance intellectuelle ? Patience, madame Jacquemart n’en est pas plus dépourvue que toute autre créature raisonnable : seulement il faut qu’elle les puise dans le corde réiréci de ses habitudes et do SOS pensées. IVabord madame lacqnomart est bavarde, et madame .lacqnemart n’est jamais seule ; raconter, pour peu qu’on lui prèle attention, osl un de ses plaisirs les plus vifs, aussi fait-elle subir h ceux qui renlourent des récits plus ou moins circonstanciés de son passé personnel et des évéuomonis romanesques (|ui oui eu lieu dans les f’aniillos au milieu desquelles elle a vécu. Kilo ne recule poini devant l’exagération, et mémo devant le mensonge, pourvu qu’elle parvienne a exciter linlérêt ; en sorte que le plus souvent se joint h la satisfaction de i)arler, qui pour elle esl déjà