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LA MÈRE D’ACTRICE.

la décide A alliT atleiulri’ au foyer la fin de la répétilion. La Saint-Robert se retire en criant de toutes ses forées :

« Oui... oui... je m’en vais... mais c’est :’i ma fille que je cède , et non pas à vous , malhonnêtes que vous êtes... S’en prendre à une femme !... Et ça s’appelle Français... allons donc ! »

Arrivée au foyer , la Saint-Robert piétine et gronde ((uelque temps. Mais elle ne peut rester seule ; il faut absolument qu’elle verse dans le sein de quelqu’un les confidences de sa colère : elle cherche un être vivant dans tous les coins et recoins du théâtre ; enfin elle avise un allumeur qui est tranquillement occupé A arranger ses quinquels pour la représentation du soir. Cela suffit ; — elle s’apiiroche de lui , et, sans prendre le temps de respirer :

<( Il est gentil , votre grigou de directeur ! Poli comme un cosaque... C’est sans doute depuis qu’il est avec mademoiselle Léonide qu’il a pris ces manières -lA... Au fait... il est A bonne école... La mère de cette créature vendait des quatre-saisons sur le carreau des Halles... Bon chien chasse de race... Et puis , l’un ne vaut pas mieux que l’autre. .. Qui se ressemble s’assemble... A bon entendeur. .. »

La Saint-Robert parlerait pendant trois heures sur ce ton à l’allumeur ébahi , si le signal de la 6n (le la répétition ne enait pas retentir ù ses oreilles. Elle s’empresse de courir vers la scène. Elle rencontre dans un corridor le groom du protecteur de sa fille, qui lui annonce que la voiture de monsieur est en bas ; le temps est beau , ces dames sont invitées ; aller faire un tour au Bois. A cette nouvelle , la Saint-Robert hâte le pas ; suivie du groom , elle arrive triomphalement sur le théâtre, jette un regard de dédain au régisseur, à l’auteur, au directeur, coudoie avec insolence toutes les femmes qui sont lu , et dit A Aurélie d’un air narquois :

« Viens , mon enfant , notre calèche nous attend. » Elle entraîne sa fille avec fracas, monte lestement dans le brillant équriiage, en adressant unîgeste d’adieu protecteur A tout le personnel du théAlre, qui est aux fenêtres de l’établissement comique, et jette au cocher ces mots : « Au Bois... par la rue de Lancry. »

Le cocher hésite un instant , car la rue de Lancry n’est pas le chemin le plus direct pour aller du boulevard Saint-Martin au Bois. Mais la Saint-Robert lui crie avec colère :

« Par la rue de Lancry... que je vous dis. » Alors il n’hésite plus : il irait au bois de Boulogne par la barrière du Trône, si on le lui ordonnait. Ce sont les chevaux (pii ont toute la fatigue. Il les lance donc du côté de la rue de Lancry. En passant devant la maison (prcllc habit<’. la Saint-Robert fait