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étaient. Et, tels qu’ils sont, crois-tu qu’aucun moyen de défense ne t’ait été donné (contre eux) ? Tu serais malheureux et bien à plaindre, si tu ignorais pour quel usage la vue t’a été donnée, et si tu fermais les yeux en face des couleurs ; combien n’es-tu pas plus malheureux et plus à plaindre encore, toi qui ne sais pas que contre tous les inconvénients tu as reçu la grandeur d’âme et la générosité des sentiments ! En face de toi ne sont que des choses en rapport avec les moyens que tu as reçus ; mais tu détournes les yeux, au moment même ou tu devrais les avoir ouverts et bien voyant. Pourquoi ne pas rendre plutôt grâce aux dieux, de t’avoir placé au-dessus des choses qu’ils n’ont pas mises dans ta dépendance, et de n’avoir donné d’action sur toi qu’à celles qui dépendent de toi ? Ils n’ont point donné action sur toi à tes parents, point à tes frères, point à ton corps, point à la fortune, à la mort, à la vie. À quoi donc ont-ils donné action sur toi ? À la seule chose qui dépende en toi, au bon usage des idées. Pourquoi te mettre sous le joug de tant de choses dont tu es indépendant ? C’est ce qu’on appelle se créer à soi-même des embarras.