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CHAPITRE XIII




Pour ceux qui parlent trop aisément d’eux-mêmes.

Lorsque quelqu’un semble nous parler de ses affaires à cœur ouvert, nous sommes entraînés, nous aussi, à lui révéler nos secrets; et nous croyons que cela est tout simple: d’abord parce qu’il nous paraît contraire à l’équité d’écouter les affaires de notre prochain, sans lui faire part à son tour des nôtres; puis, parce que nous croyons que nous ne ferions pas aux autres l’effet d’un homme franc, si nous nous taisions sur nous-mêmes. Que de fois certes on nous dit: « Moi, je t’ai dit toutes mes affaires; et toi, tu ne veux me rien dire des tiennes! D’où cela vient-il? » Ajoutez-y qu’on croit pouvoir se confier en toute sûreté à qui vous a déjà confié ses affaires? Car la pensée nous vient que cet homme ne contera jamais les nôtres, de peur que nous aussi nous ne contions les siennes. C’est ainsi qu’à Rome les gens trop prompts à parler se font attraper par les soldats. Un soldat vient s’asseoir auprès de toi sous l’habit d’un bourgeois; il se met à parler mal de César, et toi, comme s’il t’avait donné un gage de sa bonne foi, en étant le premier au dénigrement, tu dis à ton tour tout ce que tu penses; on te garotte alors, et on t’em-