Page:Les Entretiens d’Épictète recueillis par Arrien.djvu/475

Cette page n’a pas encore été corrigée

sur soi? — « Aujourd’hui je veux jouer!» — Eh bien! ne dois-tu pas le faire en veillant sur toi? — « Je veux chanter. » — Qu’est-ce qui t’empêche de le faire en veillant sur toi? Est-il dans notre vie une chose exceptionnelle, à laquelle l’attention ne puisse s’étendre? En est-il une que nous gâtions par l’attention, que nous améliorions eu n’étant pas attentif? Est-il quoi que ce soit, dans la vie, qui gagne au défaut d’attention? Le charpentier construit-il plus parfaitement en ne faisant pas attention? Le pilote, en ne faisant pas attention, conduit-il plus sûrement? Est-il quelqu’un des travaux les moins importants qui s’exécute mieux sans l’attention? Ne sens-tu pas qu’une fois que tu as lâché la bride à tes pensées, il n’est pas en ton pouvoir de les reprendre en mains, pour être honnête, décent et réservé? Loin de là: tu fais dès lors tout ce qui présente à ton esprit, tu cèdes à toutes tes tentations.

A quoi donc me faut-il faire attention? D’abord à ces principes généraux, qu’il te faut avoir toujours présents à la pensée, et sans lesquels tu ne dois ni dormir, ni te lever, ni boire, ni manger, ni te réunir aux autres hommes: « Personne n’est le maître du jugement ni de la volonté d’autrui; et c’est dans eux seuls qu’est le bien et le mal. » Il n’y a donc pas de maître qui puisse me faire du bien, ou me causer du mal; sur ce point je ne dépends que de moi seul. Puis donc qu’il y a sécurité pour moi sur ce point, qu’ai-je; à me tourmenter pour les choses du dehors? Pourquoi craindre un tyran, la maladie, la pauvreté, un écueil quelconque? Je n’ai pas plu à un tel! Est-ce donc lui qui est ma façon d’agir? Est-ce lui qui est ma façon de ju-