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— à Dieu ne plaise ! — Contente-t’en donc et prie les dieux. Mais, maintenant, nous qui pourrions ne nous occuper que d’un seul objet, ne nous attacher qu’à un seul, nous aimons mieux nous occuper et nous embarrasser d’une foule de choses, de notre corps, de notre fortune, de notre frère, de notre ami, de notre enfant, de notre esclave. Et toutes ces choses dont nous nous embarrassons, sont un poids qui nous entraîne au fond. Aussi, qu’il y ait impossibilité de mettre à la voile, et nous nous asseyons impatients, regardant continuellement quel est le vent qui souffle. — « C’est Borée ! Qu’avons-nous à faire de lui ? Et quand le Zéphire soufflera-t-il ? » — « Quand il lui plaira, mon ami ; ou quand il plaira à Eole. Car ce n’est pas toi que Dieu a établi le dispensateur des vents, mais bien Eole. » Que faut-il donc faire ? rendre parfait ce qui dépend de nous, et prendre les autres choses comme elles viennent. Comment viennent-elles donc ? comme Dieu le veut.

— « Quoi donc, je serais le seul qu’on décapiterait aujourd’hui ! » — Eh bien ! veux-tu que tous soient décapités, pour que tu aies une consolation ? Ne préfères-tu pas tendre le cou, comme, à Rome, ce Lateranus, dont Néron avait ordonné de couper la tête ? Il la tendit, et fut frappé ; mais le coup était trop faible : il la retira un instant ; puis la tendit de nouveau. Déjà auparavant, comme Épaphrodite, affranchi de Néron, était venu l’interroger sur sa haine pour l’empereur, il lui avait répondu : « Si je veux le dire, ce sera à ton maître. »

Que faut-il donc avoir présent à l’esprit dans ces circonstances ? Quelle autre chose que ces questions :