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frants, gémissants, dis hardiment qu’ils ne sont pas libres. » — « Je le dis. » — Nous voici donc bien loin de l’achat, de la vente, et de tous les modes pareils d’acquisition; car, si ce que tu nous accordes est vrai, un roi, grand ou petit, un consulaire, ou même un homme qui a été deux fois consul, ne sont pas libres, dès qu’ils sont malheureux. — Oui.

— Réponds-moi donc encore à ceci: Crois-tu que la liberté soit une chose d’importance, une noble chose, une chose de prix? — Comment non? — Se peut-il donc qu’un homme, qui possède une chose de cette importance, de cette valeur, de cette élé vation, ait le cœur bas? — Cela ne se peut. — Lors donc que tu verras quelqu’un s’abaisser devant un autre, et le flatter contre sa conviction, dis hardiment que celui-là non plus n’est pas libre, non pas seulement quand c’est pour un dîner qu’il agit ainsi, mais encore lorsque c’est pour un gouvernement ou pour le consulat. Appelle petits esclaves ceux qui se conduisent ainsi pour un petit salaire; mais ces autres, appelle-les de grands esclaves; ils le méritent bien. — Soit pour ceci encore. — Crois-tu d’autre part que la liberté soit l’indépendance et la pleine disposition de soi-même? — Comment non? — Tous ceux donc aussi qu’il est au pouvoir d’un autre d’entraver ou de contraindre, dis hardiment qu’ils ne sont pas libres. Ne regarde pas aux pères et aux grands-pères, ne cherche pas si l’on a été acheté ou vendu; mais, dès que tu entendras quelqu’un dire, « maître, » sérieusement et, de cœur, appelle-le esclave, alors même que douze faisceaux marcheraient devant lui. Si tu lui entends