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rir, tu viendras à ce moment encore pleurer de vant nous, parce que tu ne pourras plus voir Athènes, ni te promener dans le Lycée! Est-ce donc pour cela que tu as quitté ton pays? Est-ce pour cela que tu as cherché à te mettre en rapports avec quelqu’un qui pût te servir? Et te servir à quoi? A mieux analyser un syllogisme? A mieux t’orienter dans un raisonnement hypothétique? Et c’est pour ce motif que tu as laissé ton frère, ta patrie, tes amis, ta famille! Tu voulais leur revenir avec cette belle science! Ainsi, quand tu quittais ton pays, ce n’était pas pour arriver au calme et à la tranquillité de l’âme; pour devenir invulnérable; pour apprendre à ne plus accuser personne, à ne plus faire de reproches à personne; pour que nul ne pût plus te nuire, et que tu pusses ainsi être avec, tous ce que tu dois être en dépit de tous les obstacles! C’est une belle marchandise que tu es venu chercher là, des syllogismes, des sophismes, des raisonnements hypothétiques! Si c’est là ton idée, va t’établir sur la place publique avec une enseigne, comme les vendeurs de drogues. Ah! ne déclareras-tu pas plutôt que tu ne sais pas même les choses que tu as apprises, pour ne point servir à décrier l’enseignement comme inutile? Quel mal t’a fait la philosophie? Quel tort t’a causé Chrysippe, pour venir ainsi prouver par des faits l’inutilité de tous ses travaux? N’avais-tu pas assez de toutes tes misères de là-bas, de toutes tes causes de lamentations et de larmes, sans t’éloigner encore de ton pays? Voulais-tu leur en ajouter d’autres? Si tu fais de nouvelles connaissances, de nouveaux amis, tu auras de nouvelles causes de