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trouvé? — Admirable, maître, par mon salut! — Et comme j’ai dit ce passage! — Lequel? — Celui où j’ai fait le portrait de Pan et des Nymphes. — Merveilleusement. » Et tu viendras me dire que tu ne désires et ne redoutes rien que conformément à la nature! Va-t’en le faire accroire à un autre. L’autre jour n’as-tu pas loué tel individu contrairement à ce que tu en pensais? N’as-tu pas adulé le fils de tel sénateur? Voudrais-tu donc que tes enfants lui ressemblassent? — A Dieu ne plaise! — Pourquoi donc tant de flatteries et tant d’attentions pour lui? — C’est un jeune homme merveilleusement doué, et un auditeur très-intelligent. — Comment le sais-tu? — Il m’admire. — Tu nous as dit ta vraie raison. Mais que te figures-tu donc? Crois-tu que ces gens-là ne te méprisent pas en secret? Quand un homme qui a la conscience de n’avoir jamais rien dit ni rien pensé de bon, trouve un philosophe qui lui dit: « Quelle nature d’élite! Quelle honnêteté! Quelle pureté! » que crois-tu qu’il se dise, si ce n’est: « Voici un homme qui a besoin de moi? » Si je me trompe, dis-moi ce qu’il a fait qui soit l’œuvre d’une nature d’élite. Voici ce qu’il a fait: il a été assidu près de toi pendant un certain temps. Il t’a écouté parler; il t’a écouté lire. Mais en est-il plus modeste? A-t-il fait un retour sur lui-même? A-t-il le sentiment de sa misère? S’est-il dépouillé de sa présomption? Cherche-t-il un maître? — Il en cherche un, dis-tu. — Pour lui enseigner comment il faut vivre? Non pas, sot que tu es; mais pour lui enseigner comment il faut parler; car c’est pour ta façon de parler qu’il t’admire. Ecoute ce qu’il dit: « Voici un homme