Page:Les Entretiens d’Épictète recueillis par Arrien.djvu/320

Cette page n’a pas encore été corrigée

Celui qui juge est-il donc hors de tout péril? Non; le danger est égal pour lui. Pourquoi donc redouter ce qu’il prononcera? Qu’y a-t-il entre toi et le mal d’un autre? Ton mal à toi, c’est de mal te défendre. C’est de cela seul que tu dois te garder. Quant à ta condamnation ou à ton acquittement, comme ils sont l’œuvre d’un autre, c’est pour un autre aussi qu’y est le mal.

— « Un tel te menace. » — Moi! non. — « Il te blâme. » — C’est à lui de voir comment il accomplit cet acte qui est de lui. — « Il va te condamner injustement.» — L’infortuné qu’il est!


CHAPITRE XIX




De l’homme ordinaire et du philosophe.

La première différence entre l’homme ordinaire et le philosophe, c’est que celui-là dit, hélas! à cause de son enfant, à cause de son frère, à cause de son père; tandis que l’autre, s’il est jamais forcé de dire, hélas! ne le dit, après réflexion, qu’à cause de lui seul. Rien, en effet, de ce qui ne relève pas de notre libre arbitre ne peut entraver le libre arbitre, ou lui nuire; lui seul le peut. Si donc nous en arrivons presque, nous aussi, à n’accuser que