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homme qui, en retournant dans sa patrie, trouverait une belle hôtellerie sur sa route, se plairait dans cette hôtellerie, et y demeurerait. « Homme (lui dirions-nous), tu as oublié ce que tu voulais faire; ce n’est pas là que tu allais: tu ne faisais qu’y passer. — Mais c’est une bien jolie hôtellerie! — Combien il y en a d’autres qui sont jolies! Et combien de prairies! Mais ce n’était pour toi que des lieux de passage. Ce que tu voulais, c’était de retourner dans ta patrie, tirer de crainte tes proches, remplir tes devoirs de citoyen, te marier, avoir des enfants, occuper les emplois qui sont dans nos lois. Car tu n’es pas venu parmi nous pour choisir les endroits les plus jolis, mais pour vivre où tu es né, et où tu as été classé parmi les citoyens. » C’est à peu près là ce qui se passe ici. Comme ce n’est que par la Logique et son enseignement qu’on peut marcher vers la perfection, purifier son jugement et sa volonté, redresser en soi la faculté chargée de faire usage des idées, et que forcément l’enseignement de la Logique se fait dans un certain style, en même temps qu’il y a dans les matières de cet enseignement fécondité d’invention et finesse d’esprit, il est des gens qui s’y laissent prendre et qui ne vont pas plus loin; les uns s’arrêtent au style, les autres aux syllogismes, les autres aux sophismes, les autres dans quelque autre hôtellerie de ce genre, et tous y pourrissent, comme s’ils s’arrêtaient chez les sirènes.

Homme, ce que tu te proposais, c’était d’apprendre à te servir conformément à la nature de toutes les idées qui t’arrivent, à ne jamais manquer ce que tu désires, à ne jamais tomber dans ce que