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c’en est fait de l'homme en toi. Quand donc agissons-nous comme le bétail ? Quand nous agissons en vue de notre estomac ou des plaisirs de la chair, sans réflexion, salement et sans soins, de qui nous rapprochons-nous ? Des bestiaux. Qui détruisons-nous en nous-mêmes ? L’être raisonnable. Quand nous agissons avec entêtement, avec méchanceté, avec colère, avec violence, de qui nous rapprochons-nous ? Des bêtes sauvages. Nous sommes, les uns des bêtes sauvages de grande taille, les autres de ces petites bêtes malfaisantes, à propos desquelles on dit : « Au moins si c’était un lion qui me mangeât ! » Mais, avec les unes comme avec les autres, c’en est fait de notre rôle d’homme. Qu’est-ce qui sauve, en effet, un raisonnement conjonctif ? C’est d’atteindre son but ; et c’est pour cela que ce qui sauve un raisonnement conjonctif, c’est d’être composé de propositions vraies. Et qu’est-ce qui sauve un raisonnement disjonctif ? Encore d’atteindre son but. Et une flûte ? Et une lyre ? Et un cheval ? Et un chien ? Qu’y a-t-il donc d’étonnant à ce que l’homme se conserve à des conditions semblables, se perde à des conditions semblables ?

Toute qualité se fortifie et se conserve par les actes qui lui sont conformes, le talent du charpentier par de belles œuvres de charpentier, le talent du littérateur par de belles œuvres littéraires. Si vous vous habituez à écrire contrairement aux règles, tout votre talent se détruit et se perd infailliblement. De même l’honnêteté se conserve par des actes honnêtes, et des actes déshonnêtes la détruisent ; la loyauté se conserve par des actes loyaux, et des actes contraires la détruisent. Les