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coin, tandis que je pourrais être couronné à Olympie ? Quand m’annoncera-t-on pour moi une pareille lutte ? » Voilà comme vous devriez être tous.

Parmi les gladiateurs de César il y en a qui s’indignent de ce que personne ne les emmène pour les mettre en face d’un adversaire, qui font pour cela des prières aux dieux, et qui vont trouver leurs surveillants pour leur demander de combattre. Ne verra-t-on donc parmi vous personne de cette trempe ? Moi je voudrais traverser la mer à cette seule fin de voir ce que ferait mon lutteur, et comment il se tirerait de la question qui lui serait posée. — « Je ne veux pas de celle-là, » dit-il. — Est-ce qu’il est en ton pouvoir d’avoir la question que tu veux ? On t’a donné tel corps, tels parents, tels frères, telle patrie, et tel rang dans cette patrie ; puis tu viens me dire : « Change-moi la question. » N’as-tu donc pas les moyens de te tirer de celle qui t’a été donnée ? (Tu devrais dire) : « À toi de me présenter une question ; à moi de m’en bien tirer. » Au lieu de cela tu dis : « Ne me présente pas telle forme de syllogisme, mais telle autre ; ne m’oppose pas telle objection, mais telle autre. » Un temps viendra bientôt où les acteurs croiront que leurs masques, leurs brodequins et leurs robes sont eux-mêmes ! Homme, ce sont là tes instruments, et les éléments de ton rôle. Parle un peu, afin que nous sachions si tu es un véritable acteur ou si tu n’es qu’un farceur : car tout le reste leur est commun. Ôtez donc à un individu ses sandales et son masque , et amenez-le sur la scène sous sa forme propre, en sera-ce fait de l’acteur,