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pour trouver dans ce passage la preuve qu’Épictète était Chrétien ou Juif. Voyez, d’ailleurs, la distance qu’il établit autre part entre les Galiléens et lui :

« Pourquoi ne ferions-nous pas par raison, dit-il, ce que les Galiléens font par coutume (ἤθει) ? » (Liv. 4, ch. 7.)

Il n’est évidemment pas un des leurs, puisqu’il se met au-dessus d’eux. Et dans cet endroit où il se sert de leur exemple pour prouver la possibilité de ce qu’il demande, est-ce de la charité qu’il est question ? Non, mais précisément de ce qui l’a fait si souvent appeler un rêveur sans entrailles, de la résignation complète à la perte de nos parents et de nos amis.

Ces deux passages sont les seuls où il ait parlé des Galiléens et des Juifs. Rien n’autorise donc à dire qu’il se soit lui-même déclaré un des leurs. Puis, avait-il besoin d’eux pour arriver à la charité ? Non : il trouvait dans le Stoïcisme lui-même tous les principes dont la charité est la conséquence. Pour les premiers Stoïciens, comme pour lui, nous sommes tous enfants du même père, tous frères en Dieu, qui nous a tous créés avec les mêmes facultés et la même destinée. Que faut-il de plus pour conduire à la charité ? Et quelle est la doctrine qui l’établisse sur d’autres prémisses ? Ajoutez-y la vieille théorie grecque, que l’on ne fait jamais le mal que par erreur ou par ignorance, et que les coupables ne sont que de malheureux aveuglés ; quel besoin lui trouverez-vous encore d’aller