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LE VOYAGE DE GYLFE.

veau endormi. Un peu avant le jour, il reconnut que le géant dormait profondément ; il se leva, marcha vers lui, et le frappa à la tempe avec tant de force que le marteau enfonça jusqu’au manche. Skrymer se leva, passa la main sur sa joue, et dit : « Des oiseaux se seraient-ils perchés dans ce chêne au-dessus de moi ? il m’a semblé que de la fiente était tombée des arbres ; ou bien te serais-tu réveillé, Thor ? Il est temps de se lever et de s’habiller, quoique nous ne soyons pas fort éloignés du château d’Utgôrd. Vous avez dit entre vous que je ne vous paraissais point de petite taille ; mais vous verrez des hommes bien autrement grands que moi, si vous arrivez à Utgôrd. Je veux vous donner de bons conseils à ce sujet. Ayez de l’humilité, car les courtisans de Loke d’Utgôrd n’endureront pas l’orgueil de jouvenceaux de votre sorte. Si vous ne voulez point profiter de mes avis, retournez sur vos pas, c’est ce que vous aurez de mieux à faire. Mais si vous voulez continuer votre voyage, tirez à l’orient ; je vais au nord, vers les montagnes que vous voyez. » Skrymer prit ensuite le bissac sur son dos et entra dans la forêt. On ignore si les Ases désirèrent de le revoir sain et sauf.

46. Thor continua de marcher avec ses compagnons jusqu’à midi. Ils découvrirent alors dans une grande plaine un château si élevé, qu’on en distinguait à peine le faîte, et s’avancèrent de ce côté ; une grille fermée entourait le château. Thor s’approcha de cette grille, mais il ne put l’ouvrir ; c’est pourquoi il fut