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premier poème sur gudrun.

ensemble, elle ne se plaignait pas comme les autres femmes.

2. Des Jarls s’approchèrent avec respect pour adoucir son rude chagrin. Gudrun ne pouvait point pleurer, tant la douleur l’oppressait : elle voulait mourir.

3. Les nobles filles des Jarls, parées d’or, étaient assises devant Gudrun ; chacune d’elles racontait sa plus grande douleur, celle qui l’avait le plus affligée.

4. Alors Gjaflœg, la sœur de Gudrun, dit : « C’est de moi surtout que les joies de la vie se sont le plus éloignées : j’ai perdu cinq maris, deux filles, trois sœurs, huit frères ; j’ai seule survécu. »

5. Mais Gudrun ne pouvait pleurer, tant elle éprouvait de douleur de la perte de son époux, tant elle était affligée de la mort du roi.

6. Alors Herborg, la reine des Huns, dit : « De plus grands chagrins encore m’ont atteinte. Dans le Sud, sept de mes fils et mon époux ont succombé dans les batailles.

7. « Mon père, ma mère et quatre de mes frères ont été trahis par le vent sur les vagues ; les flots ont heurté avec violence les ais du bordage.

8. « J’ai été chargée seule du soin de leurs funérailles, de préparer, d’orner leur tombeau ; j’ai enduré tous ces malheurs en un an, il n’y a donc plus de joie pour moi.

9. « Puis, je fus garrottée et faite prisonnière de guerre vers la fin de cette même année ; on me força