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IX



 
Tosto che il castellan di Damatia
Certificossi chera morto Orrilo,
La colomba lasciò, che avea legata
Sotto l’ala la lettera col filo.
ARIOSTO



Cornelio monta un soir sur le sommet de sa tour pour respirer un instant. La nuit menaçait d’être orageuse ; de gros nuages noirs étaient amoncelés à l’orient, où des éclairs commençaient à briller, et le vent d’est, qui les apportait, chassait déjà de lourdes vapeurs à travers le zénith. De temps en temps tombaient des gouttes de pluie, dont le bruit léger troublait seul le silence répandu sur la nature, ce silence de recueillement, précurseur ordinaire des tempêtes. Le vieux magicien, immobile, les yeux fixés sur la ville qui s’étendait à ses pieds, semblait plongé dans une profonde méditation.

« Comme te voilà triste et sombre, vieille Padoue ! pensait-il, et quelquefois ses lèvres exprimaient tout haut ses pensées. Ah ! il est temps pour toi et pour moi de quitter ce monde où notre rôle est fini. Qui dirait, à te voir si déserte, que toi aussi tu as eu ton règne sur la terre ; que les écoliers de tous les pays d’Europe se pressaient à tes école ; que les affiliés mystérieux de la science se tournaient vers toi comme le Musulman vers la Mecque ; que l’orgueilleuse Salamanque, malgré ses cryptes célèbres, s’abaissait devant tes docteurs ?