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tre mary ? — C’est vostre grace, madamoiselle, il n’a pas plus de trente-cinq ou quarante ans ; mais c’est qu’il prend son temps : il a veu que ceux qui y sont à present, ce sont gens (au moins quelques uns, da) de si petite estoffe, et que trois ou quatre taverniers commencent à briguer pour y entrer, qu’il s’est hazardé comme les autres, encore qu’il ne soit que procureur du Chastelet. Il espère y faire ses affaires, s’il y entre.

— Et y gaigne-on donc quelque chose ? ce dit une bonne mère qui avoit son chaperon destroussé à la mode ancienne13. Par le vray Dieu, mon mary deffunct, monsieur Dainbray14, qui a esté trois fois prevost des marchands, n’a jamais profité à l’Hostel-de-Ville que d’un pain de succre par


13. Le chaperon étoit la marque de la petite bourgeoisie (V. notre Recueil de variétés historiques et littéraires, etc., t. 1, p. 306). Il fut aussi, jusqu’au temps de Louis XIV, l’habillement des femmes nobles pendant le deuil de leurs maris. Saint-Simon, dans une note du Journal de Dangeau, décrit longuement celui que portoient les princesses du sang. (Lémontey, Essai sur la monarchie de Louis XIV, etc., précédé de nouveaux mémoires de Dangeau, Paris, 1810, in-8, p. 204.)

14. C’est Daubray qu’il faut lire. L’auteur des caquets prête une erreur à sa veuve, en lui faisant dire que son « mary deffunct » fut trois fois prévôt. Claude Daubray, conseiller, notaire et secrétaire du roy, fut élu échevin en 1574, sous la prévôté de Monsieur le président Charron, puis prévôt de 1578 à 1580, époque où il eut pour successeur Auguste de Thou. Voilà toute sa vie municipale. (V. Piganiol, Description de Paris, t. VIII, p. 441.)